Le Monde du Train
Train de nuit, le retour en grâce
Les trains de nuit doivent contribuer à réduire la part de l'avion, et ainsi à lutter contre le réchauffement climatique. Mais si la volonté semble de mise, la partie s'avère très difficile...

couchette de seconde classe. Photo SNCF
A l'orée du XXème siècle, les trains de nuit avaient connu un coup d'arrêt. Les rames étaient vieillissantes et les passagers pas assez nombreux. Beaucoup pourtant regrettaient leurs disparition, soulignant les atouts écologiques du train face à l'avion.
Quand la Deutsche Bahn avait supprimé ses trains de nuit City Night Line en 2014, on rappelait volontiers l'avantage qu'ils offraient, celui d’arriver tôt le matin en (relativement…) bonne forme à Berlin, Hambourg, Munich, en ayant quitté la veille au soir Paris-Est. Idem pour le Trans-European Express qui reliait pour sa part Paris à Moscou via la capitale allemande.

Cabine d’un train de nuit NightJet (ÖBB)
L'heure est depuis quelques années à la relance des lignes abandonnée, en France comme ailleurs en Europe. Ce qui passe par la rénovation des voitures, avec l'ajout du wifi et de prises électriques, des sièges et couchettes plus confortables, l'amélioration de la climatisation et une meilleure insonorisation.
Les compagnies ferroviaires historiques SNCF, DB, ÖBB et CFF ont engagé une coopération pour de nouvelles liaisons de trains de nuit transfrontalières. La première exploitée relie Paris à Vienne depuis fin 2021, la seconde Paris à Berlin depuis fin 2023. Ces trains seront opérés sous la marque NightJet, celle de l’ÖBB autrichienne.

couchette de 1ère classe. Photo SNCF
Le constat est le même au niveau des lignes domestiques. Jean-Baptiste Djebbari, le ministre des Transports de l'époque, avait alors annoncé le renouvellement pour 100 millions d’euros du matériel pour assurer des dessertes nocturnes.
Supprimée en 2017, la ligne entre Paris et Nice - passant par Marseille-Blancarde, Toulon, Les Arcs, Saint-Raphaël, Cannes et Antibes - rouvre en 2021. L'année suivante, le train-couchettes Paris-Tarbes-Hendaye s'ajoute aux deux lignes étant restées en activité, Paris-Rodez-Toulouse-Latour de Carol et Paris-Briançon.
La SNCF est toutefois confrontée à une difficulté, celle de s’équiper de rames et cabines autrement plus confortables que celles exploitées jusqu’à présent, si elle veut projeter son réseau domestique de train de nuit au-delà des frontières et séduire une clientèle beaucoup plus large.
Problème, la plupart des constructeurs de train de nuit des années 60 et 70 n'existent plus. Alstom n'en conçoit pas. Seule reste une poignée fabriquants tous situés en Europe de l'Est, ainsi que Siemens qui peut compter heureusement sur son usine de Simmering-Graz-Pauker (SGP) située à Vienne-Simmering, dont la gamme Viaggio a été logiquement choisie par ÖBB.

© ÖBB / Gasser-Mair
L'exploitation du train de nuit est aussi un énorme défi économique. Outre le confort, une place dans le train de nuit ne peut être vendue qu’une fois par jour (jusqu’à cinq fois par jour pour une place en avion et jusqu’à quatre pour une place dans un train de jour). De plus, la production de trains de nuit transfrontaliers est complexe et coûteuse, avec plus de personnel de service, plus de contrôleurs en raison des voyages transfrontaliers, des services de nuit mieux payés…
L’exploitation des liaisons ferroviaires en train de nuit est, il est vrai, un énorme défi économique. Outre le confort, une place dans le train de nuit ne peut être vendue qu’une fois par jour (jusqu’à cinq fois par jour pour une place en avion et jusqu’à quatre pour une place dans un train de jour). Pas étonnant que la plupart des activités trains de nuit, notamment en Autriche, soient subventionnées.
Bref, un soutien financier public sera très probablement indispensable pour soutenir le modèle économique de ces offres de nuit. Surtout si l’on souhaite que leurs tarifs soient vraiment compétitifs, sachant que le train de jour, sans autant de contraintes, peine déjà à faire face à la concurence de l'avion…
© oopartir.com - 2025 - Texte et photos Vincent de Monicault